[Focus] Lire sans se ruiner (et en toute légalité :)


Si tout allait pour le mieux, dans le meilleur des mondes*, l’accès à l’information, à la culture et à la littérature serait gratuit. En tout temps et en tout lieu. Mais ce n’est pas le cas. Du coup, je vais (tenter de) vous proposer des astuces pour lire toujours plus, en faisant des économies, que vous viviez en France, ou en Afrique subsaharienne – notamment au Gabon. (Thank me later!)

La loi dite Lang**, relative au prix unique d’un livre sur le territoire français, adoptée en 1981, a représenté l’une des réformes les plus bénéfiques pour la protection du livre et ses acteurs. De l’auteur au distributeur, en passant par l’éditeur et le consommateur, l’adoption de cette loi a signé un tournant sans précédent. Nous lecteurs, surtout, avons désormais l’assurance de ne pas être floués sur le prix d’achat d’une oeuvre, selon que l’on parte chez un libraire ou un autre. Seulement, malgré cet effort commun consenti, certains plusieurs livres ne sont pas donnés. J’en ai encore fait l’expérience au cours de la rentrée littéraire 2018. Pour peu que votre intérêt se porte sur QUELQUES nouveautés (voir ma sélection de la rentrée 2018), il y a de fortes chances que ça finisse par peser sur le portefeuille.

Il m’est alors semblé nécessaire d’écrire ce petit focus qui, je l’espère, nous aidera tous à lire davantage … sans (trop) se ruiner.

Pour ce qui est de la France, les bibliothèques et médiathèques municipales que l’on retrouve dans TOUTES les villes du pays sont LA meilleure alternative à l’achat. Il est vrai que si vous vivez à Roanne, Saint-Nazaire, ou Tourcoing… il y a très peu de chances que vous trouviez un Sony Labou Tansi ou un Dongala sur les étagères. Mais les ouvrages de Léonora Miano, Calixthe Beyala et Maryse Condé y sont parfois, dans les rayons “Littérature étrangère”, juste entre les romans suédois et japonais.

Par contre, si comme moi vous êtes définitivement des victimes (consentantes) du consumérisme moderne et que vous préférez malgré cette alternative -(quasi)gratuite-  ACHETER… Je vous prie de poursuivre la lecture de ce billet.

Les livres d’occasion sont MA solution première et efficace. Je pourrais vous conseiller de chiner, de faire les brocantes le dimanche matin et espérer tomber sur un super livre afro par hasard… buuut je suis là pour vous apporter des propositions concrètes (ça y est, j’me la pète). L’un des meilleurs distributeurs de livres d’occasion en France métropolitaine est Boulinier, et sa chaîne de librairies. Vous aurez toutes sortes d’ouvrages (essais, cuisine, romans, discours, histoire, philo, la liste est longue), dont les prix varient tous entre – tenez vous bien- 0,50€ et 6€!

J’y ai dégoté de véritables perles telles que Remember Ruben de Mongo Béti , Mon frère de Jamaica Kincaid ou encore Katiba de Jean-Christophe Rufin. Tous les trois à un peu moins de 5€!

En option un peu plus onéreuse, mais très intéressante, avec bibliothèque en ligne et possibilité d’acheter à toute heure, et à distance… c’est le fameux livre numérique a.k.a. ebook. Les œuvres du domaine public*** sont toutes gratuites en version numérique (c’est bon à savoir), et celles qui n’en font pas partie sont vendues à moindre coût (5 à 7€ moins cher que le livre papier). Je me suis souvent rabattue sur le livre numérique en période de vaches maigres (parfois elles étaient même faméliques, les vaches), et bien que je sois une fervente défenseure du format papier… je ne peux nier les avantages irréfutables du ebook.

Enfin, pour ce qui est de la France, vous pouvez faire le choix de la patience afin de dépenser moins. Plusieurs des livres sortis cette année seront disponibles dans (plus ou moins) 10 mois  au format poche, aux éditions Folio, Pocket, Le livre de Poche et Points. Pourquoi donc se presser à acheter THE nouveauté à 20€ pièce? L’attente est une stratégie gagnante que j’ai adoptée à la sortie du dernier Dan Brown, Origine, et que je n’ai pas regrettée. Les livres de poche sont souvent à moins de 10€ l’unité. Aussi, les Folio à 2€ (seulement!), sont ces petits livres qui se glissent dans tous les sacs, et se lisent partout. Ne courons plus. Ce n’est vraiment pas la peine de se précipiter pour un livre, quand en réalité, nous en avons plusieurs autres sur nos étagères qui sont tristement non-lus… Si avec ça, il y en a encore un.e, vivant en France, qui me rétorque que “lire, ça coûte cher”… je lui déboîte l’épaule (and I’m not even joking 🙂 !!!!

Comme certains parmi vous le savent déjà via mes comptes Instagram et Twitter, je suis rentrée définitivement  pour un long moment au Gabon. En rentrant me ré-installer dans mon pays, je savais que je ferai face au manque criard d’espaces dédiés à la culture et à la littérature. Les bibliothèques municipales sont très pauvres et les librairies sont mal achalandées. A mes yeux d’ailleurs, au Gabon, comme dans d’autres pays d’Afrique subsaharienne, il n’y a pas de librairies. Oui, je répète: il n’y a pas de librairies. Il y a, au mieux, des papeteries, kiosques à journaux, qui proposent entre les cartables et stylos à bille, des livres au programme scolaire, des best-sellers vus et revus (Musso, Coelho, Pancol, en tête de peloton) et… des Harlequin.

Demander un Mbougar Sarr dans un de ces magasins? N’y pensez pas. De plus, pour le peu de (BONS) choix qu’il y a… les prix sont exorbitants. Le Musso paru il y a 4 ans, format de poche, à 10.000 fcfa (15€)? Non merci. Le circuit de distribution du livre, au Gabon notamment, est encore très archaïque, et laisse peu de place aux nouveautés et à la diversité.

Les lecteurs/acheteurs de la Littérature Africaine (hors livres aux programmes scolaires) sont peu nombreux, donc faibles chances d’écouler les stocks sur le marché. Nos petits kiosques à journaux et papeteries, qui se nomment pompeusement “librairies” ne sont pas prêts à prendre ce risque pour une aussi petite cible d’intéressés.

Les afropéens, galvanisés à coups de slogans de type “Wakanda Forever” et “L’Afrique, c’est chic“, vous pouvez ranger vos répliques prémachées… Redescendez sur terre, il y a encore un travail énorme à réaliser chez nous pour la valorisation de la Culture et surtout de notre Littérature.  Mais qu’à cela ne tienne, je vous rassure: Izuwa a malgré tout trouvé des solutions pour se procurer de BONS livres, d’Afrique et d’ailleurs, à moindre coût.

La première chose (inutile) à savoir est qu’Amazon livre en Afrique subsaharienne. Surtout… ne tombez pas dans le piège. Pour 2 malheureux romans et 1 bande-dessinée, le tout à moins de 4 kilogrammes, il y a de fortes chances que vous ayez à payer des frais avoisinant les 50€ (livraison et douane). Merci, mais non merci. Amazon, en Afrique, ON OUBLIE.

Au final, me direz vous, mais quels sont les bons plans pour un lecteur compulsif, vivant en dessous du Sahara?

Il y a ce que nous appelons communément les “librairies par terre“. Elles se trouvent dans tous les marchés de toutes les mégalopoles africaines, y compris Libreville, et sont constituées assez sommairement. Ce sont tout simplement des livres d’occasion, disposés sur une natte, un tapis, à même le sol, et vendus à des prix défiant toute concurrence. C’est LA bonne affaire pour tout lecteur fauché et/ou pingre. Que vous soyez à Brazzaville, Cotonou, Abidjan, Yaoundé ou Accra… vous trouverez des livres dans les marchés, exposés par terre, à la merci de la poussière, à côté de parapluies multicolores et des vendeurs de sachets d’eau. J’adore!

Par ailleurs, j’ai pu noter, des initiatives individuelles de création de bibliothèques et petites librairies, face au manque évident de structures de ce genre. Au Gabon il y a par exemple:

  • La bibliothèque Imya à Port-Gentil
  • La bibliothèque Le Maquis à Port-Gentil
  • Le café/bar L’Instant Lithéraire à Libreville

(Si vous connaissez des adresses de petites librairies et bibliothèques privées dans d’autres pays d’Afrique, n’hésitez pas à les laisser en commentaire la famille.)

Et de nouveau, la solution pratique que je compte vous proposer, celle qui ne déçoit jamais… est le livre numérique. Il est moins cher, et vous évitera le casse-tête de la livraison. Mes dernières réticences envers cette forme de lecture se sont évaporées dès mon retour au Gabon. Pouvoir commander des e-book, quand je veux, où je veux, via l’application Kindle, est un atout non négligeable.

Lire sans se ruiner, que l’on vive en France, ou en Afrique Subsaharienne n’est pas toujours facile. Cependant, en faisant quelques concessions, c’est possible d’y parvenir. Je sais que pour beaucoup, le téléchargement gratuit de livres en PDF est un moyen efficace de se procurer des ouvrages. Pour la petite histoire, Becoming, le récent livre de Michelle Obama, je l’ai reçu cracké, en PDF, le lendemain de sa sortie, dans ma messagerie Whatsapp de la part d’un ami attentionné. ET JE NE L’AI PAS LU.

(Ok, j’avoue qu’il ne m’intéressait pas du tout et que si je voulais le lire, j’aurais ouvert ce PDF sans remords car il s’agit, pour moi,  d’un livre-propagande inutilement SURmédiatisé… mais passons!) Au-delà de cela… Télécharger des PDF gratuits d’auteurs Afros, connus et moins connus, ce n’est pas une alternative que je recommande. Les auteurs africains et afro-descendants ont déjà tellement de mal à écouler leurs œuvres auprès du grand public, que nous ne pouvons aider à valoriser la Littérature des Afriques si nous cherchons toujours la gratuité. Achetons légalement. Empruntons auprès de bibliothèques agréées. Mais cessons de nous échanger des PDF.

Achetons Touhfat Mouhtare, Hemley Boum, Elgas, PS Assaghle, Max Lobe, Sami Tchak, Blaise Ndala, Cheryl Itanda, Théo Ananissoh, Anas Atakora, Joseph Correa, Fatou Diome, Emmanuel Dongala, Armand Gauz… Et j’en passe!

Achetons, les amis. Et surtout………. Lisons.

*Si tout allait pour le mieux, dans le meilleur des mondes: Formule empruntée à Pangloss, dans Candide de Voltaire

** Loi dite Lang: Loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre, surnommée du nom du Ministre de la Culture de l’époque, Jack Lang

*** Livres du domaine public: Grands classiques de la littérature française et internationale – Baudelaire, Flaubert, les soeurs Brontë, Dickens, Hugo …