[Nigéria] Children of Blood and Bone – Tomi Adeyemi


C’est en sentant pulser le sang dans ses veines et chacun de ses os craquer sous l’afflux d’énergie spirituelle, que Zélie Adebola découvre ce que cela coûte d’être dotée de Magie. Au Royaume d’Orïsha, Zélie est une adolescente vivant entourée de son père et de son frère aîné Tzain. Ce royaume fictif qui puise son inspiration dans l’histoire et la spiritualité Nigérianes et Yorubas*, connaît depuis toujours de forts clivages ethniques. Un groupe, les Maji, pratique la magie, a des pouvoirs hors-normes, la peau noire et les cheveux argent. Les Kosidàn, qui constituent la seconde ethnie de ce royaume ont la peau basanée, les cheveux noirs de jais… et ne détiennent aucun pouvoir magique. Cette différence fondamentale est la source de toutes les tensions qu’a connu le royaume d’Orïsha, avec pour point de non retour, 11 années plus tôt, “THE RAID”. The Raid a été une opération politique et surtout militaire, menée par le roi Saran, visant à éradiquer, assassiner, tous les Maji du Royaume (dont la mère de Zélie). Il s’ensuivit une boucherie sans pareil, à laquelle le roi n’a accordé qu’une seule et unique “faveur”: les enfants des Maji appelés les Diviners, trop jeunes pour avoir développés leurs pouvoirs,  seront épargnés car ne pouvant plus (supposément) pratiquer la magie de leurs défunts parents.

Credit: thoughtsandafterthoughts.com

Zélie Adebola, née d’une mère Maji et d’un père Kosidàn a grandi dans ce royaume d’Orïsha, dans le petit village côtier d’Ilorin. En tant que Diviner (fille de Maji, dans l’incapacité ? de pratiquer la magie), elle essuie discriminations et railleries. Chaque jour qui passe la rapproche soit de la mort soit d’une vie misérable passée à courber l’échine, payer des taxes arbitraires et à ne jamais pouvoir s’échapper de sa condition. Les Diviners n’ont pas accès à l’éducation, à certaines fonctions (sécurité, santé, justice…), et sont tout juste bons pour la pêche, l’agriculture vivrière, la mendicité , les tâches domestiques et les travaux forcés! Triste destin duquel par un heureux hasard, ou plutôt par la main des Dieux, Zélie sera détournée. En effet, grâce à la fille du roi Saran lui-même, elle découvre que la Magie peut revenir aux Diviners et leur permettre de se défendre face aux injustices qu’ils subissent. Mais pour faire revenir la Magie dans le royaume, de façon définitive et auprès de tous les Diviners, il faudra se lancer dans une épopée périlleuse sur les traces des trois artifacts  (The Sunstone, the Scroll, the Dagger). Ce sont trois reliques qui permettraient de ramener à Orïsha la Magie et donc un équilibre. Un équilibre où les Kosidàn ne piétineraient plus les Majis/Diviners.

“I longed for the day I would feel the magic of the dead in my bones, but right now, all I can feel is an unnerving tingle in my veins.”

Children of Blood and Bone

Ce roman, écrit par la romancière Nigériane Tomi Adeyemi est le premier tome de ce qui sera une saga, une trilogie, titrée The Legacy of Orïsha. Il est également ma première expérience de l’afrofuturisme** en paralittérature et du roman New adult. La particularité du genre New Adult est qu’il est fait pour caractériser les challenges du passage à “l’âge adulte”. Ouverture sur le monde, remise en question de la société dans laquelle le jeune adulte a toujours évolué, indépendance et affirmation de Soi… ce sont des thématiques que l’on retrouve toujours dans les lectures new adult, et Children of Blood and Bone n’y échappe pas.

“The paradox of eduction is precisely that as one begins to become conscious one begins to examine the society in which he is being educated.”

James Baldwin

“Le paradoxe de l’éducation vient précisément du fait que lorsqu’on devient conscient, on commence à questionner la société dans laquelle on a été éduqué.” James Baldwin.

Fan Art – Zélie Adebola

Le passage à l’âge adulte n’est certes pas de tout repos, mais c’est celui qui nous apprend le plus sur nous-mêmes et la société dans laquelle nous évoluons. En général, c’est à cet âge-là que nous décidons de la société dans laquelle nous SOUHAITONS vivre. C’est à cet âge-là que nous avons à choisir entre être esclave de notre quotidien ou maître de notre destin. Intrépide, déterminée, généreuse et aimante, Zélie Adebola a choisi de se réapproprier son destin et faire sien le combat pour son peuple.

“You know how to win. Just make sure you know when to fight.”

Children of Blood and Bone

Comme beaucoup d’autres à son âge, en dépit de sa bonne volonté, Zélie s’expose parfois souvent à des erreurs stupides. Au fil des pages, la consternation et l’exaspération ne vous lâcheront pas en lisant les maladresses (et c’est un euphémisme!) de cette young adult!

Vous connaissez ce sentiment tellement fort face à un film d’horreur ou un thriller? Quand les personnages principaux vont AU DEVANT des ennuis en décidant de se séparer? Eh bien j’ai eu exactement le même sentiment à la lecture de ce livre (rires). Oh, Lord! règle numéro 1 si vous êtes en groupe, et poursuivis par un taré en tronçonneuse, une poupée tueuse ou une armée enragée: surtout, ne vous séparez JAMAIS.

En fait, j’ai parfois eu envie de leur foutre des baffes  rappeler leur priorité à ces jeunes gens. “Non les gars, vous savez, vous avez les troupes du roi Saran à vos trousses, faire trempette ou la fête maintenant, ce n’est vraiment pas nécessaire”

L’enchaînement des événements, le dénouement (que l’on devine dès le milieu du roman) est typiquement New adult. Donc, si vous commencez ce livre, ne vous attendez pas à un suspens fou, des dialogues élaborés et une histoire transcendante. Si vous commencez ce livre, attendez vous à des personnages attachants et une histoire attendrissante bien que ponctuée de quelques rebondissements.  Ce roman est un enseignement de la tolérance qui, au final, fait plaisir à lire. C’est tout un univers à découvrir et Tomi Adeyemi a bien planté le décor et ses personnages à travers ce premier tome, qui me laisse espérer un second tome décapant et un peu moins… téléphoné! (fingers crossed!)

Si vous aimez les univers fantastiques, ou que vous souhaitez découvrir l’afrofuturisme, Children of Blood and Bone est fait pour vous.

P.S.: Ce roman n’est disponible qu’en anglais, mais je vous rassure, il est à la portée de tout francophone ayant au moins un niveau B2.

Où se le procurer?

Amazon 

Format papier: 17.61 €

Format ebook: 8.50€

* Yoruba – Yorùbá : groupe ethnique d’Afrique de l’Ouest que l’on retrouve au Nigéria, Bénin, Ghana, Togo

** Afrofuturisme: courant artistique et littéraire, prisé par les afro-américains, mêlant  science-fiction, histoire, spiritualité, fantastique et ésotérisme africains.