Comme ça fait du bien aujourd’hui, de me poser confortablement et d’écrire cette première ligne. C’est à me demander pourquoi je ne m’y suis pas remise plus tôt. J’ai longtemps hésité sur le format, et tergiversé sur le bon moment. Mais il n’y a pas de bon moment pour revenir. Il n’y a que de mauvaises raisons de ne pas le faire.
Entre mon (avant)dernier post et celui-ci, trois années se sont écoulées. Oui, déjà. Professionnellement, je suis passée par plusieurs changements et même bouleversements. J’ai signé un CDI (ça fait bien longtemps, désormais) dans l’entreprise pour laquelle je voulais travailler en rentrant au Gabon. J’ai suivi dans le même temps une formation diplômante en Supply Chain, afin de ne rien perdre de mes acquis et rester compétitive sur le marché du travail. Le programme avancé de CIPS (Level 5 of the Chartered Institute for Procurement and Supply) pour lequel j’ai été retenue a été la piiiire expérience de ma vie et en même temps elle restera la formation la plus complète que j’ai pu avoir dans le domaine.
Il me fallait produire tous les trois mois pendant deux ans et demi des essais en anglais, sur la base des modules suivis. Au bout des trente mois de formation, j’ai dû monter un projet d’envergure à implémenter en entreprise, suivi d’une soutenance devant un panel de trois professionnels de la Supply Chain et un manager de ma boîte.
Aussi, CIPS m’a obligée aidée à me dépasser en anglais. La formation est 100% en anglais, mon tuteur était néerlandais, donc bonne chance pour contourner cela. Autant vous dire que j’ai parfois eu envie de me tirer une balle. Ou tout simplement d’abandonner. Durant deux ans et demi, j’ai passé chaque module en me disant que ce serait le dernier parce qu’entre le travail et ma vie sociale/privée, je n’avais plus une minute à moi! Durant cette période, mes lectures étaient elles aussi assez… atypiques. Je ne suis pas sûre que vous auriez voulu lire des articles sur le sujet 😅. Ci-dessous un petit florilège en images de mes incontournables livres de chevet de la période. Yes, CIPS almost killed me.
Cependant, tout est bien qui finit bien. Votre go a tout déchiré et j’ai soutenu avec un “mérite” (merit =over 60%) en Mars dernier.
En dehors de ce défi professionnel, ces dernières années ont été un déliiiiire dans ma vie privée. Mon Orungu* préféré a demandé ma main (ouiiii!) et, pour ceux qui ne me suivent pas sur Instagram, je suis devenue maman. Ça fait pas mal de nouvelles, en deux lignes seulement.
En trois ans je suis passée par bien des « état-pes ». J’étais entre changements et déceptions. Entre doutes et prises de risque. En me lançant dans l’aventure nébuleuse et ô combien périlleuse de la vie à deux puis de la maternité, je me suis posée des dizaines de questions. Comment vais-je m’organiser? Comment vais-je gérer les heures de labeur et les pleurs? Comment sont encadrés les congés maternité? Mais COMMENT vais-je m’en sortir?
J’arrête de vous donner le tournis. Vous l’aurez compris, c’était n’importe quoi dans ma tête. La question qui me faisait le plus peur était: où trouverai-je le temps de m’occuper d’un ÊTRE HUMAIN ULTRA DÉPENDANT?!
La réponse est venue toute seule. Je ne trouve pas du temps pour mon bébé mais tout mon temps lui appartient (du moins les deux/trois premiers mois, ne me jugez pas). J’ai passé les premiers mois entre tire-lait, couches et bavoirs. Puis le boulot s’en est mêlé , c’était déjà la fin des congés maternité, alors j’ai dû partager mon quotidien entre la base logistique, mon Orungu préféré, et Baby K.
6 mois sont vite passés, et les premiers signes d’autonomie sont apparus. A peine assis, qu’il rampait sur le ventre, à la recherche de ses premières bêtises. A peine assis, qu’il ne voulait plus que maman tienne son bibi (sauf quand il était trop lourd pour lui).
Et j’ai compris. J’ai compris que le temps de la dépendance était quasiment derrière nous. Ces six mois se sont si vite envolés au final. Ils ont couru comme bientôt Baby K gambaderait prêt à tout casser autour de lui (la dépendance aurait-elle insidieusement changé de camp ahah?)
Bien que la tentation fut grande, je ne vous servirai pas un laïus sur combien de fois je n’avais plus le temps de lire ou écrire en devenant Maman. Ce serait bien trop facile (et malhonnête). La vérité est que lire et surtout écrire n’ont pas été MA grande priorité pendant trois ans. Tout simplement.
Du temps, on en a souvent. Pour ce et ceux qui comptent, pour ce qui nous fait vibrer, ou pour ce qu’on décide de prioriser.
Huit heures passées sur mon clavier à blogguer, c’était renoncer à huit heures de jeux, de boulot, de courses, de repos, de câlins, de sorties… renoncer à toutes ces choses si vitales à mon essence. Passer des moments de qualité en famille, organiser notre mariage, progresser au travail et me former ont été ma priorité.
Aussi, la procrastination (mon pire ennemi) a bien souvent eu raison de ma motivation à publier, et ce, même quand je tombais sur un super roman que j’aurais aimé pouvoir partager ici ou sur Instagram. Il y avait toujours une série à bingewatcher sur Netflix, un proche à visiter, un brunch à organiser, une intention, une volonté manifeste, à reporter au nom de la tranquillité. J’avais la fatigue pour prétexte et me disais « orh, je le ferai demain, quand je serai plus posée. » Je me suis plutôt bien distraite de la rédaction d’articles.
J’ai su éviter avec panache tous les chemins qui mènent au blogging. J’ai relégué le blog à un coin de ma tête, que je guettais parfois souvent, coupable, éhontée, en me disant tout bas, sans vraiment y croire, “le mois prochain, je m’y remets!“ 36 mois plus tard, enfin scotchée à ce clavier, je me rends compte à quel point cela m’a manqué. C’est arrivé bien tard, mais c’est arrivé!!!
J’y retrouve goût, je me donne le temps de ne pas perdre ce goût , et surtout, je le fais avec la sérénité et le calme que requiert cette douce passion. J’ai aimé écrire cet article, bien qu’il m’ait pris de longues semaines à finaliser et publier (je vous entends d’ici « Quoi? Plusieurs semaines pour écrire ce verbiage?”)
Et oui, il m’a fallu plusieurs semaines pour combattre la crainte de décevoir et surtout, la crainte de ne plus savoir. Quand tu as mis autant de temps sans écrire, tu finis par en avoir peur. Tu redoutes le moment où tu devras t’y remettre. Celui où tu seras face à une feuille blanche et peut-être, rien ne viendra. Alors tu le repousses, tu l’évites. Tu t’évites. Toutefois, ce que j’apprends au fil de ces lignes, c’est que l’écriture est un exercice du coeur. Il ne s’oublie pas, il ne s’évite pas. Il s’impose à toi, impérieux et totalitaire. A cinq heures du matin, la veille d’un évènement important, à 17h le dimanche quand tu paresses devant une série, tard le soir, après avoir tourné la dernière page du dernier Esther Sarah Bulle et que ta tête bourdonne de petites inspirations non invitées, inopinées.
L’écriture, ou du moins l’envie d’écrire, ne s’évite pas. Elle se repousse juste. Se reprogramme. Se retarde un peu. Mais finit souvent par avoir gain de cause.
L’écriture est une expérience du silence. Une appréciation de la sérénité. Une ode à l’introspection et à la réflexion. L’écriture est la mise sur papier, sur quelques mots, sur quelques pages, du beau, du moi, et du nous.
Alors j’écris et je publie en pointillés. Incertaine du résultat, mais résolue à aller jusqu’au bout de cette intention d’user de mon temps pour blogguer. Apprendre à en refaire une priorité, et honorer votre présence à mes côtés, toujours, malgré mon absence.
Je ne ferai pas de promesse, c’est anxiogène. À bientôt la famille. À bientôt, et merci d’être (toujours) là.
*Orungu (prononcer « oroungou ») est un groupe ethnique du Gabon, originaire de Port-Gentil et ses alentours.